Le domaine de la mobilité, et en particulier la mobilité de proximité, s’engage actuellement dans une profonde disruption qui va avoir un impact important sur nos modes de vie. Cette disruption est d’abord générée par la généralisation des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) qui permettent l’émergence de nombreux services qui n’auraient pas pu se développer autrement : comment imaginer par exemple un service de vélo en free-floating sans l’application qui permet de repérer le vélo le plus proche de vous ? Comment facilement faire appel à un VTC sans utiliser son smart phone ?
Ainsi, grâce aux NTIC, de nouveaux acteurs de mobilité se multiplient, souvent sous forme de start-up, et proposent de nombreux services1 qui s’ajoutent aux traditionnels modes qui prévalaient jusqu’ici : l’automobile individuelle dont la part modale reste prédominante, et les transports en commun qui souffrent de ne pouvoir s’imposer comme mode privilégié malgré tous les efforts (financiers notamment) des autorités organisatrices. Or justement, ces nouveaux acteurs de mobilité sont souvent indépendants de ces autorités organisatrices, et s’affranchissent des besoins de subventions tellement indispensables à l’équilibre économique des transports en commun.
Et pourtant, ces nouveaux services, du fait qu’ils proposent une alternative à la voiture individuelle, représentent un véritable service public, permettant d’assurer la plupart du temps un développement durable de la mobilité. Les individus en mobilités utilisent finalement une chaîne de services qui favorise l’usage des transports en commun : il pourra ainsi en sortant de chez lui utiliser un vélo libre-service ou un taxi collectif, qui le mène vers un axe de transport de masse (tramway, métro, train régional) avant qu’il ne diffuse plus loin grâce à une trottinette vers son lieu de destination…
Cependant, à côté des start-up pourvoyeuses de solutions souvent originales et innovantes, de nouveaux grands acteurs, généralement basés outre atlantique, cherchent petit à petit à prédominer : Google, Uber, Apple, Tesla… avant qu’ils ne soient rejoints par les acteurs chinois : Baidu, le Google Chinois, lance en test son bus sans conducteur au Japon ! En s’imposant naturellement sur le secteur économique, ces acteurs économiques majeurs menacent de créer un oligopole incontournable. Dans la mesure où ils restent indépendants des autorités organisatrices de la mobilité (AOM) comme on l’a vu plus haut, la puissance publique se verrait alors dépourvue de tout moyen pour imposer son pouvoir politique et des orientations qu’elle souhaite mener dans le domaine de la mobilité.
Il est donc indispensable de construire dès à présent les outils qui permettront de garantir aux autorités organisatrices tout leur pouvoir en matière de politique de la mobilité sur les territoires.
Cela passe notamment par la maîtrise indispensable des informations voyageurs, des horaires ou des capacités de trafic des différents modes. Mais cela passe également par la maîtrise de moyens de paiement unifié pour permettre d’assurer une subvention incitatrice à l’usage de la chaîne de mobilité qui s’avérerait la moins « coûteuse » en termes de développement durable (équilibre social, économique et environnemental).
Ces outils sont à inventer rapidement pour garantir l’avenir qu’on souhaite construire.
____________
1 : Ce développement grandissant des nouveaux services de mobilité est désormais couramment appelé MaaS (Mobility as a Service), en référence au même mouvement du SaaS (Software as a Service) qui engage à s’affranchir de la « propriété » de l’outils pour mieux profiter du service rendu.